Kultur’Elles : La Nilsson, la voix du siècle

Birgit Nilsson sur scène
©Unknown photographer - Svenskt Fotoreportage via IMS Vintage Photos, Public Domain (https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=75134380)

La Suède en kit vous propose, dans sa série Kultur’Elles, de découvrir celles qui ont fait l’Histoire de la Suède, des femmes fortes et puissantes, influenceuses de leur temps dont l’empreinte politique, sociétale ou artistique ont marqué et façonné le pays.

Elle a des timbres de philatélie à son effigie en Suède et au Nicaragua. Celle dont le timbre vocal enchante les mélomanes du monde entier figure aussi sur le billet de banque de 500 kr. Fidèle à la péninsule de Bjäre, elle revint régulièrement s’y ressourcer dans la ferme familiale, aujourd’hui transformée en musée. La grande soprano dramatique crée une bourse  pour les jeunes musiciens et surtout Le Prix Birgit Nilsson, sorte de prix Nobel de  l’opéra et de la musique classique, témoin et héritage de sa générosité et de son amour de la musique au corps et au coeur. Birgit Nilsson, Miss N, acclamée comme La Nilsson.

© Ludivine Chazal

De son vrai nom Birgit Marta Svensson, La Nilsson, née dans le sud de la Suède, se destine à une carrière d’ingénieur agronome avant que son talent ne se révèle dans la chorale de Västra Karup, son village natal. Elle fait ses débuts à Stockholm en 1946, dans le rôle d’Agathe du Freischütz. Puis, c’est Lady Macbeth, et enfin tous les rôles de soprano lyrique et grand-lyrique (Tosca, Senta, Aida, Sieglinde…), tout cela en suédois.

Billet suédois de 500 kr
©Riksbanken

« Isolde m’a rendue célèbre, Turandot m’a rendue riche »

Sa légende se construit dans les années 1950 à Bayreuth, ses premières Brünnhilde se situent vers 1955. Mais c’est véritablement dans les années 60 qu’elle domine la scène wagnérienne. Véritable phénomène vocal, la pureté métallique de son timbre et la richesse de ses moyens lui permettent d’atteindre la perfection dans les rôles les plus longs et les plus exigeants du répertoire wagnérien. Elle ouvre la saison de la Scala en 1958, et devient l’une des premières chanteuses non-italiennes à le faire, en interprétant Turandot, un autre de ses rôles mythiques. Reconnue et adulée dans le monde entier, Birgit Nilsson joue les deux rôles féminins de Tannhäuser dans une performance inoubliable au Metropolitan, chante et enchante les Chorégies d’Orange et l’Opéra Garnier de Paris. Jusqu’à la fin, elle conserve sa voix d’airain, sa présence vocale, son incroyable technique capable d’une puissance tellurique comme des sons filés les plus purs. Birgit Nilsson est réputée pour son endurance vocale et physique exceptionnelle. Quand on lui demande l’essentiel pour chanter le rôle d’Isolde, elle répond avec humour : « Le secret pour chanter Isolde, c’est de porter une bonne paire de chaussures ! »

Birgit Nilsson dans MacBeth
Birgit Nilsson dans MacBeth ©Sven Järlås – Press photograph, 1947, Public Domain (https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=1245808)

L’apogée de la carrière de Birgit Nilsson coïncide avec celle du disque et de la stéréo. Elle laisse une discographie considérable qui va de Mozart à Puccini en passant par Verdi et Beethoven et bien sûr Wagner. Ses quarante années de carrière s’achèvent en 1984, elle fait ses adieux à l’opéra et ne se produit plus que pour des récitals de lieder. Mariée dès 1948 à un vétérinaire, le couple n’aura jamais d’enfant. Birgit Nilsson se consacre nuit et jour, année après année, à son art et à sa voix : « Quand vous réussissez à 100 % un soir et qu’une marée d’applaudissements et de bravos vient vous renverser… pour un artiste, c’est une expérience incomparable à aucune autre dans le monde ». Elle quitte la scène en 1986 pour se consacrer à l’enseignement. La Nilsson meurt à Västra Karup le 25 décembre 2005.

Birgit Nilsson sur la scène de l'Opéra de Vienne en 1961
Birgit Nilsson sur la scène de l’Opéra de Vienne en 1961 ©Fayer/Birgit Nilsson Foundation

Une grande voix et un grand coeur, une personnalité débordant d’humour et ne résistant pas à confier les multiples anecdotes qu’elle rassemblera dans une autobiographie, Birgit Nilsson entretient d’excellentes relations avec ses collègues du monde lyrique, nombreux sont ceux qui ont dégusté ses köttbullar en toute convivialité. C’est également une femme d’affaire avisée et une redoutable négociatrice pour ses cachets : elle est une des artistes les mieux payées de sa génération. À sa mort survenue en 2005 à l’âge de 87 ans, l’artiste légua toute sa (colossale) fortune au profit d’une fondation, The Birgit Nilsson Foundation, destinée à récompenser les meilleurs artistes lyriques, chefs d’orchestre, metteurs en scène, en activité. Elle avait déjà créé une « Bourse Birgit Nilsson » en 1969, accordant jusqu’à 100 000 couronnes suédoises à de jeunes musiciens débutants leur carrière.
Le Prix Birgit Nilsson, créé en 2009, est le prix de musique classique le plus prestigieux existant : un million de dollars récompensant tous les quatre ans l’exception et l’exceptionnel. Les derniers récompensés sont la soprano suédoise Nina Stemme en 2018 et le violoncelliste Yo Yo Ma en 2022.

Birgit Nilsson
Source : Musée Birgit Nilsson

Pour en savoir plus:

Son musée

Sa page Internet officielle

Un podcast qui lui est consacré

A propos Sylvie R 181 Articles
En Suède depuis plus d' une trentaine d'années, j'ai habité Uppsala, Ultrå à côté d'Örnsköldsvik et Torserud dans le comté de Värmland, vit depuis 20 ans à Nacka. Après trois décennies comme enseignante titulaire au Lycée Français Saint-Louis, je suis doula, coach de grossesse et accouchement à Stockholm. J'adore écrire et aime partager mes bons plans et bons coins en Suède.

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